Chers toutes et tous,
Voilà maintenant quatre ans et demi que ce blog existe.
Je l'ai ouvert alors que je traversais l'épreuve la plus difficile de ma vie : celle des TCA. Anorexique, puis franchement boulimique, j'ai mis du temps à me sortir de ce pétrin. Heureusement, même si j'avais souvent l'impression du contraire, j'ai continué à avancer dans la vie. J'ai terminé mes études, commencé à travailler, je me suis installée en colloc' avec Mme S.(mon chat) et petit à petit, j'ai accepté puis appris à être moi.
Dans quelques jours, je vais avoir 28 ans. Et je suis plutôt fière de celle que je suis devenue. Aujourd'hui, la boulimie est en très grande partie derrière moi. Les rares fois où elle se rappelle à moi, elle est réduite à un reliquat, une vague survivance du monstre qu'elle pu être.
Je l'ai vaincue. Au bout d'une longue guerre d'usure.
Evidemment, ma vie est loin d'être parfaite. Il y a des jours plus compliqués que d'autres. La solitude, toujours elle, est pesante. La quête de soi, encore inachevée, épuisante. Et l'espérance d'un monde meilleur, dans le contexte complexe qui est le nôtre, a un goût amer.
Néanmoins, je suis toujours là, plus forte, plus sûre de qui je suis, de ce que je veux, et de ce que je ne veux pas.
L'épreuve de la boulimie m'a ouvert les yeux. Et comme je le disais dans un article précédent, elle a agit comme un accélérateur : plutôt que de se penser et penser le monde à 50 ou 60 ans, je pense tout cela à bientôt 30 ans. C'est un atout considérable qui va me permettre de tendre vers la vie que je souhaite, la vie qui me correspond.
Le parcours du combattant
Boulimie et dépression nous poussent en effet à côtoyer le pire de nous même, l'abîme et les ténèbres du tréfonds de nos âmes. La mort aussi. Parce que l'on est trop maigre, parce que l'on a trop mangé, parce que parfois, on s'imagine (faussement) que la faucheuse, elle seule, pourra faire taire cette insidieuse et interminable souffrance.
Quand on touche du doigt cette partie de nous, on peut se laisser happer par elle. Elle nous enveloppe, brouille nos repères, noie nos espoirs. Nimbé.e.s de désespoir, la nourriture devient à la fois un moyen de s'en libérer - un très bref instant - avant qu'elle ne nous y enchaîne à nouveau. J'étais dans cet état là lorsqu'un premier décembre 2011, je publiais ici mon premier article.
Ce blog (en plus du traitement et du suivi psychologique, entendons nous bien) a alors été un point d'ancrage ouvert sur le monde, un endroit - fixe et à moi- où je pouvais crier ma douleur sans craindre de me sentir humiliée. J'ai pu commencer à mettre des mots et à accepter la maladie, dans toute sa trivialité, pour mieux la combattre.
Et petit à petit, chers toutes et tous, vous êtes venu me lire, m'encourager, partager avec moi cette souffrance. J'ai rapidement compris que je n'étais pas la seule à vivre cet enfer, enfer qui se répétait d'une personne à une autre, selon un processus qui revenait souvent de la même façon.
Avec vous, j'ai pu commencer à réfléchir à des subterfuges, des moyens de lutter -même sommairement- contre la boulimie. Et aujourd'hui, elle est derrière moi.
Une renaissance
"Ce n'est qu'une fois perdu que l'on commence à se retrouver soi même" disait Henry David Thoreau, un philosophe américain du XIXe siècle.
Je ne suis pas une grande partisane des citations hors contexte, très à la mode ces dernières années. Mais je suis bien forcée d'admettre que cette dernière me parle énormément.
Se perdre, c'est se retrouver seul.e face à soi même. Loin des paraîtres, loin des diktats et des conventions sociales.
Se perdre, dans la dépression, les TCA, l'alcool ou les drogues, c'est se retrouver dans sa réalité brute, je dirais même approcher l'essence même de notre identité. La lutte pour sortir de ce cauchemar nous oblige à faire le bilan de notre vie, et de comprendre pourquoi diable on est tombé si bas. Les remises en question sont nombreuses et salvatrices.
Ainsi, c'est fort.e.s de cette expérience que l'on peut prendre un autre chemin, avancer vers le bonheur, loin des TCA et de toute autre conduite addictive.
Je vais illustrer mon propos -très très alambiqué, je le conçois - de quelques exemples concrets : J'ai compris que je me fondais dans un moule qui ne me convenait absolument pas. Depuis je me défends d'entrer dans quelque case que ce soit. Je suis devenue plus exigeante quant à mes conditions de travail, j'essaie d'avoir un rôle plus actif et citoyen dans la société, je me libère de certaines contraintes sociales (work in progress... Pas évident), et... ben et voilà.
En bref, je me sens mieux dans mes baskets, "plus moi" et en phase avec qui je suis.
Comme je le disais plus haut, ma vie n'est pas rose. Mais j'ai progressé, et j'essaie encore, même si ce n'est pas évident. Le seul échec pour l'instant est mon célibat subi. Je n'arrive manifestement pas à m'aimer encore suffisament pour me laisser aimer ou ne serait-ce qu'approchée. Mais ça viendra !
Et encore une fois, je m'égare...
C'est le moment !
Mais cet égarement, chers toutes et tous, sera le dernier ici, sur ce blog.
J'aurais mis un peu de temps à le "lâcher" une bonne fois pour toute : néanmoins, ces lignes que vous lisez (encore faut-il que vous ayez eu le courage de vous avaler tout ce roman !) sont les dernières.
Je ne publierai plus sur ma.boulimie.over-blog.com.
La boulimie est derrière moi, je souhaite qu'elle y reste. Et je ne suis plus légitime dorénavant pour prodiguer des conseils.
Donc, je m'en vais.
Un grand merci à toutes celles et toutes ceux qui ont pris le temps de me suivre, régulièrement, sporadiquement ou par hasard.
Si vous venez ici, en quête d'espoir, alors encore une fois, je le dis : la boulimie, ce n'est pas pour la vie. On s'en sort. Courage !
Bonne et heureuse vie à tous !