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Décalage ?

Je viens tout juste de me lancer dans une nouvelle entreprise : la lecture de Docteur Sleep, roman de Stephen King, retraçant les mésaventures de Dany Torrance devenu adulte et passablement alcoolique comme son défunt père (souvenez-vous, il s'agit du petit garçon de Shining, autre roman de King adapté au cinéma par Kubrick). 

Décalage ?
Décalage ?

Lors de ma lecture (et tandis que j'étais complètement absorbée par le récit), un passage m'a arrétée quelques secondes. Je l'ai lu, relu et re-relu tellement il me semblait limpide dans la vérité crue qu'il exprimait. Ce passage, très court, le voici :

 

Peut-on réellement se remémorer la souffrance ? Non, Teuch ne le croyais pas. On sait que la souffrance existe et qu'on l'a connue, mais ce n'est pas la même chose.

Stephen King, Docteur Sleep

Voilà...

 

En quelques mots, King exprime une idée que je croyais complexe et qui me taraudait depuis quelque temps.

On a beau se souvenir avoir souffert, rien n'y fait. On ne revit pas cette souffrance, elle ne court plus dans nos tripes ou dans nos têtes et nous éloigne irrémédiablement de l'expérience douloureuse que nous avons pu connaitre.

C'est actuellement ce que je vis.

Les troubles alimentaires s'éloignent à mesure que le temps passe. La souffrance les accompagnant (ou les causant) se tait au point de n'être plus qu'un vague murmure dans ma tête. Biensûr, elle reste toujours dans un coin de mon esprit, prête à ressurgir quand elle percevra une faille ; ça je le sais et j'en suis pleinement consciente. Mais ce murmure n'est plus rien à coté de ce que j'ai vécu il y a quelques années. Lorsque j'étais si mal, lorsque je ne parvenais plus à me controler, que la dépression était à son comble et mon rebus de la nourriture à son paroxisme. 

Je sais que je l'ai vécu, mais à moins de retomber aussi bas, jamais je ne le ressentirai une nouvelle fois.

 

 

Décalage ?

Et cela m'amène à cette question : suis-je encore légitime pour parler d'anorexie, de boulimie ou plus largement de TCA ? Ai-je encore ma place pour prodiguer des conseils aux autres malades, alors que je ne me rends plus compte de la difficulté vécue par ces dernier-es. Je ne l'ignore pas (comment le pourrais-je ?!) mais pour autant, je ne la vis plus. Et "ce n'est pas la même chose".

 

Alors je m'excuse si vous veniez à ressentir un décalage entre mes propos, mes conseils, ou plus globalement les quelques artistes postés ces derniers temps, avec votre propre vécu, vos difficultés, vos souffrances.

 

Si ce décalage entre souffrance vécue au présent, et souffrance vécue au passé venait à trop se faire sentir, j'aimerais que vous y perceviez avant tout un message d'espoir plutôt qu'une forme d'éloignement de votre réalité. Mais surtout, n'hésitez pas à m'en faire part. 

V
C'est une question intéressante que tu te poses... J'irai même plus loin: on ne peut même pas se remémorer sa souffrance passée, et parfois même comprendre les phases antérieures de nos TCA. Cependant, on peux se souvenir de phrases que l'on a écrites ou pensées à ce moment, qui reflètent notre état passé... A mon avis, c'est important de continuer à en parler, que l'on en soit sorti ou non!
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